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Photo du rédacteurSergio Schoener

Art culinaire ou Science culinaire ?


L'Art culinaire, pour la forme de ses manifestations, dépend de l'état psychologique de la société. Il suit nécessairement et sans pouvoir s'y soustraire les impulsions qu'il reçoit de celle-ci.


Là où la vie aisée et facile, n'est troublée par aucune préoccupation, où l'avenir est assuré et à l'abri des chances de la fortune, l'Art culinaire prend toujours un développement considérable, parce qu'il contribue à l'un des plus agréables parmi les plaisirs qu'il soit donné à l'homme de goûter.


Au contraire, là où la vie est active, où les mille soucis de l'industrie et du négoce accaparent l'esprit de l'homme, celui-ci ne peut donner à la bonne chère qu'une place restreinte dans ses préoccupations.


Le plus souvent, la nécessité de se nourrir apparaît aux gens emportés par le tourbillon des affaires, non plus comme un plaisir mais comme une corvée. Ils considèrent comme perdu le temps passé à table et ce qu'ils exigent avant tout de ceux qui ont charge de les sustenter, est de ne jamais les faire attendre.


On peut et on doit déplorer de telles habitudes, ne serait-ce qu'au point de vue de la santé des convives dont l'estomac est appelé à en supporter les conséquences. Elles sont absolument blâmables, mais il est hors de notre pouvoir de les refréner, tout ce que peut en pareil cas la science culinaire, c'est de pallier dans la mesure du possible, par la perfection de ses produits.


Les imprudences des Hommes. le client exigeant d’être servi rapidement, nous n'avons pas d'autre alternative que de lui donner satisfaction ou de le perdre car ce que nous lui refusons en ce sens, le concurrent le lui donnerait.


Nous sommes donc obligés de nous plier à sa fantaisie. Si nos méthodes habituelles de travail, si notre genre de service ne se prêtent pas à cette obligation il nous faut résolument les réformer.


Une seule chose doit demeurer immuable et intangible, c'est la qualité des mets, c'est la valeur savorique des fonds de cuisine, base de notre travail . Nous avons déjà commencé la réforme dans le dressage, une foule d’impedimenta a disparu ou va disparaître des services modernes, les socles, les bordures les hâtelets, etc ...

On ira plus loin encore dans cette voie. Nous porterons la simplicité à ses dernières limites, mais en même temps, nous augmenterons la valeur savorique et nutritive des mets, nous rendrons ceux-ci plus légers, plus facilement digestibles pour les estomacs affaiblis, nous les concentrerons, nous les dépouillerons de la plus grande partie de leurs matières inertes.


En un mot, la cuisine, sans cesser d'être un art, deviendra scientifique et devra soumettre ses formules empiriques trop souvent encore, à une méthode et à une précision qui ne laisseront rien au hasard.


Sergio Schoener

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